Encore des morts dans la province de l’Equateur. Des dizaines personnes ont trouvé la mort suite un naufrage tragique d’une Baleinière, survenu dans la nuit du mercredi 10 au jeudi 11 septembre 2025 sur la rivière Maringa en provenance de la ville de Basankusu.
Interrogé à ce sujet, l’élu provincial de Basankusu, l’honorable Jean Paul Elekola, s’est dit profondément choqué, de ce drame et appelle les autorités compétentes à des mesures concrètes pour prévenir de telles catastrophes dans l’avenir. À l’en croire, ces naufrages en répétition dans cette partie du pays sont liés à l’absence de l’État dans plusieurs domaines, en l’occurrence, celui de la navigation.
Équateur Magazine : Honorable, quelle est votre réaction suite ce nouveau drame ?
Jean Paul Elekola : Je suis très touché, ému et consterné. Ces naufrages en répétition dans la province de l’Équateur sont le signe évident de l’inaction d’un État en faillite. C’est inacceptable que, malgré les alertes lancées, rien de concret ne soit fait pour sécuriser nos voies fluviales.
E. Mag : Étiez-vous informé de la situation du navire avant le naufrage ?
Jean-Paul Elokola : Non. Comme beaucoup, j’ai appris la nouvelle après coup. Aucun système d’alerte ou de suivi n’est en place.
E.Mag : Que disent les premières autorités locales ?
Jean-Paul Elekola : Rien de nouveau. Ce sont les mêmes discours qu’on entendait déjà après les drames de Mayita, Mbandaka et Gombalo. Aucune mesure conservatoire concrète n’a jamais été prise.
E.Mag : Avez-vous été en contact avec des familles de victimes ?
Jean-Paul Elekola : Oui. Plusieurs m’ont contacté. L’un d’eux m’a confié : qu’il avait quitté Waka centre vers 17h, et vers 22h, en arrivant au confluent des rivières Nsolo et Baringa, la Baleinière a percuté un convoi de pirogues motorisées. Ils étaient une centaine.
E.Mag : Qu’attendez-vous comme actions concrètes ?
Jean-Paul Elekola : D’abord, l’application des mesures conservatoires du gouvernement central. Ensuite, une surveillance accrue des embarcations, une gestion collégiale entre les services de l’État et les armateurs, et surtout, l’interdiction des navigations nocturnes.
E.Mag : Y a-t-il eu une certaine négligence de la part du gouvernement provincial ?
Jean-Paul Elekola :Absolument. L’absence de l’État dans plusieurs domaines, y compris la navigation, est flagrante. Il n’existe quasiment aucun contrôle fluvial.
E. Mag: Quels sont les dispositifs de sécurité maritime mis en place ?
Jean-Paul Elekola :Pratiquement aucun. Le commissaire fluvial se contente d’arrêter les embarcations transportant du bois, souvent pour ses propres intérêts.
E. Mag: Ces dispositifs sont-ils suffisants ?
Jean-Paul Elekola :Non. Il faut non seulement les renforcer mais aussi innover en matière de sécurité fluviale.
E. Mag: Envisagez-vous de proposer des lois ?
Jean-Paul Elekola :Hélas! ce domaine relève du gouvernement central. Au niveau provincial, nos leviers sont très limités.
E. Mag: Le budget provincial prévoit-il des moyens pour la protection civile ?
Jean-Paul Elekola :Non. Il n’y a jamais eu de budget alloué, malgré les propositions faites par le gouverneur.
E. Mag: Envisagez-vous une enquête parlementaire ?
Jean-Paul Elekola : Oui, mais j’avoue que je suis sceptique. Les enquêtes précédentes n’ont jamais abouti à des actions concrètes, même avec des preuves accablantes.
E. Mag: Quels partenariats la province pourrait-elle nouer ?
Jean-Paul Elekola :Des partenariats publics-privés peuvent permettre de renforcer la surveillance des eaux. Il y a des options intéressantes, mais encore faut-il une volonté politique.
E. Mag :Ce naufrage aura-t-il un impact sur l’économie locale ?
Jean-Paul Elekola : Bien sûr. Ces populations vivent au jour le jour. La plupart des échanges de marchandises et capitaux se font par voie fluviale. L’arrêt ou la rareté des embarcations adéquates affecte directement les revenus locaux et même le tourisme.
E. Mag: La province prévoit-elle un accompagnement psychologique pour les familles endeuillées ?
Jean-Paul Elekola :Non. Aucun dispositif n’est mis en place à ce niveau.
E. Mag: Existe-t-il un fonds d’aide provinciale pour les victimes ?
Jean-Paul Elekola : Il est censé exister, mais il n’est pas opérationnel.
E. Mag : Les citoyens vous interpellent-ils sur les risques liés au transport fluvial ?
Jean-Paul Elekola : Oui, à plusieurs reprises. Malheureusement, leurs cris restent souvent sans suite.
E. Mag :Quel enseignement tirez-vous personnellement de ce drame ?
Jean-Paul Elekola :C’est triste à dire, mais l’État n’existe pas dans notre province, du moins pas pour protéger ses citoyens.
E. Mag :Y a-t-il un plan provincial de gestion des catastrophes maritimes ?
Jean-Paul Elekola :Je ne pense pas. Même au niveau central, ces plans existent sur papier mais ne sont pas exécutés.
E. Mag :Allez-vous plaider pour une meilleure coordination avec le pouvoir central ?
Jean-Paul Elekola :Oui, mais soyons réalistes : ces démarches finissent souvent dans des circuits de corruption, entre politiciens de Kinshasa et acteurs locaux. Ce sont les enveloppes qui circulent, pas les solutions.
E. Mag: Votre message à la population ?
Jean-Paul Elekola : Je demande à la population de faire preuve de vigilance. Choisissez avec prudence vos moyens de transport. Ceux qui sont censés nous protéger sont eux-mêmes dépassés. Je partage vos douleurs. Soyons unis dans la prière.
Propos recueillis par Hornela Mumbela